Depuis 2014, la Cour pénale internationale (CPI) enquête sur des allégations de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis en Ukraine en relation avec l’agression russe. La CPI prend en compte les données ukrainiennes et russes, ainsi que les preuves de pays tiers et les informations de la société civile.
Le ministre russe des Affaires étrangères continue de répandre de fausses informations sur le travail des structures et organisations internationales. Cette fois, Sergueï Lavrov, afin de discréditer la justice internationale, a répandu un bruit selon lequel la Cour pénale internationale aurait « négligé » l’enquête sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis sur le territoire des parties temporairement occupées des régions de Donetsk et Louhansk.
«Plus de 3 000 rapports sur des crimes contre les habitants du Donbass ont été envoyés à cette Cour pénale internationale, et il n’y a eu aucune réaction… Nous n’avons plus aucune confiance en cet organe», a-t-il déclaré.
L’information de S. Lavrov selon laquelle la CPI « néglige » l’enquête sur la situation en Ukraine est un mensonge pur et simple. Depuis 2014, la CPI examine l’affaire intitulée « Crimes présumés commis dans le cadre de la situation en Ukraine depuis le 21 novembre 2013». Outre les preuves ukrainiennes et internationales, la CPI prend également en compte les données russes.
Les autorités ukrainiennes ont saisi la Cour pénale internationale immédiatement après le début de l’occupation russe des territoires ukrainiens en 2014. Le premier appel à la CPI concernait des crimes commis sur le territoire de l’Ukraine pendant la période du 21 novembre 2013 au 22 février 2014. En septembre 2015, l’Ukraine a déposé un deuxième recours auprès de la Cour, dans lequel elle a demandé l’ouverture d’une enquête sur les crimes commis sur le territoire ukrainien à partir du 20 février 2014 et sans préciser de date de fin.
En décembre 2020, la CPI a annoncé qu’elle était prête à ouvrir une enquête pénale sur la commission de crimes de guerre en Crimée et dans le Donbass. Le Bureau du Procureur de la CPI a conclu qu’il existait des motifs raisonnables de croire que des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre avaient été commis en Ukraine dans le contexte de l’agression russe. Dans le même temps, la Cour pénale internationale a souligné que malgré le fait que l’Ukraine ait ouvert une enquête, la CPI a également pris en compte les données de la Russie lors de l’enquête préliminaire.
« Tout au long de l’enquête préliminaire, le Bureau a bénéficié de l’implication conjointe des autorités ukrainiennes, y compris la fourniture d’informations détaillées sur les enquêtes et les procédures au niveau national concernant les crimes relevant de la compétence de la CPI, initiées par les autorités nationales en lien avec les crimes présumés commis par toutes les parties au conflit. Notre évaluation a également pris en compte les informations disponibles sur les procédures judiciaires nationales concernant la situation en Ukraine, initiées par la Fédération de Russie », avait alors souligné le Bureau du Procureur de la CPI.
De plus, la Cour pénale internationale reçoit des données sur les crimes présumés non seulement des États, mais aussi de témoins civils. Le Bureau du Procureur de la CPI a créé un portail spécial par lequel toute personne disposant d’informations concernant la situation en Ukraine peut contacter les enquêteurs de la CPI. En outre, l’Agence de justice pénale de l’UE (Eurojust) et le Bureau du Procureur de la CPI ont créé des lignes directrices pratiques pour la société civile sur la documentation des crimes internationaux majeurs tels que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité. C’est pourquoi les affirmations de la Russie selon lesquelles la CPI « néglige » toute information nécessaire à l’enquête sont un faux grossier.
À la suite de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie le 24 février 2022, le procureur de la Cour pénale internationale, Karim Khan, a annoncé qu’il demanderait l’autorisation d’ouvrir une nouvelle enquête en Ukraine. Déjà à la mi-mars, 43 États avaient demandé à la CPI d’ouvrir une enquête sur les présomptions de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis par les occupants sur le territoire de l’Ukraine ; un nouveau procès de la CPI a commencé sur la base de ces appels. L’enquête de la Cour pénale internationale couvre « toutes les allégations passées et présentes de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou de génocide commis sur n’importe quelle partie du territoire de l’Ukraine par toute personne depuis le 21 novembre 2013 », indique le site Internet de la CPI.
C’est en Ukraine que travaille depuis mai la plus grande équipe d’experts de la Cour pénale internationale de l’histoire, une équipe de 42 enquêteurs, experts légistes et personnel de soutien pour enquêter sur les crimes relevant de sa compétence. En outre, le Bureau du Procureur de la CPI a rejoint l’équipe conjointe (Joint investigation team – JIT) chargée d’enquêter sur les crimes de guerre russes en Ukraine au printemps 2022. La JIT a été créé par l’Ukraine, la Lituanie, la Pologne, l’Estonie, la Lettonie et la Slovaquie. Elle comprend également l’Agence européenne de justice pénale (Eurojust), où 27 États membres de l’UE et 10 autres États sont représentés.