Cette tribune a été initialement publiée dans EURACTIV.fr
La montée du populisme et de l’autoritarisme dans de nombreux pays impacte fortement la liberté de la presse dans le monde. Celle-ci a atteint son niveau le plus bas depuis 13 ans, d’après une recherche financée par les États-Unis.
L’ONG Freedom House a publié son rapport annuel sur la liberté de la presse le 28 avril, évaluant ainsi la liberté de la presse dans chaque État du monde.
Les organes de presse aux États-Unis, par exemple, ont été frappés de plein fouet par l’élection de Donald Trump, un président «médiasceptique». «Donald Trump méprise clairement la tradition de liberté de la presse du pays, mais on ne sait pas encore si les actions de la nouvelle administration mettront réellement en péril le travail des journalistes», peut-on lire dans le rapport.
«En critiquant les médias, les personnalités politiques américaines encouragent leurs homologues du monde entier à faire de même. Les attaques violentes contre les journalistes et la presse aux États-Unis mettent à mal notre rôle de modèle démocratique pour la liberté de la presse», a indiqué Michael J. Abramowitz, le président de Freedom House.
Recul en Europe
D’après le rapport, les pays d’Europe ou de sa périphérie ont également régressé en matière de liberté de la presse. Et la tendance ne date pas d’hier. Le gouvernement conservateur de Hongrie a ainsi commencé à consolider sa surveillance médiatique en 2010. Le rachat de Népszabadság, l’un des principaux journaux du pays, en 2016, a été un exemple édifiant de la détermination du gouvernement à étouffer toute critique dans les médias.
Le Premier ministre serbe, Aleksandar Vučić, a quant à lui passé le plus clair de sa campagne électorale à critiquer les médias. Il a notamment allégué que les journalistes avaient des liens avec la mafia ou étaient en contact avec des agences de renseignement étrangères.
Parmi les États où la situation s’est empirée figurent la Pologne, la Turquie et la Hongrie. La détérioration de la situation en Hongrie et en Turquie dure depuis plusieurs années, mais les récents événements de la Pologne sont les plus alarmants, indique le rapport. Le gouvernement polonais, dirigé par le parti Droit et justice (PiS), a boycotté les médias critiques et pris le contrôle de la télévision publique. Des entreprises publiques en Pologne ont investi l’argent de leurs publicités dans des médias partisans du gouvernement.
Freedom House a établi une échelle allant de 0 à 100, 100 étant le pire score. En Europe de l’Est, la Bulgarie, dont le score était de 40 en 2016, a enregistré 42 points cette année. De la même manière, la Serbie est passée de 45 l’année dernière à 49 cette année. L’Albanie et la République tchèque ont quant à elles maintenu les mêmes scores, respectivement de 51 et 21. En comparaison, la France obtient un score de 26, le Royaume-Uni de 25 et la Belgique de 12.
«Les violentes attaques observées constituent un réel danger pour la liberté de la presse dans le monde», a ajouté Michael J. Abramowitz. La Russie (83 points) n’est pas exclue de ce danger. D’après le rapport, les médias contrôlés par le Kremlin, qui diffusent de fausses informations et compromettent la légitimité des institutions ukrainiennes, ont limité l’accès du gouvernement de Kiev à de nombreux médias russes et empêché à des dizaines de journalistes russes d’entrer en territoire ukrainien.
Par ailleurs, trois éditeurs de l’un des derniers groupes médiatiques indépendants du pays, RBC, ont été remplacés par des membres de l’agence de presse d’État TASS, après avoir dénoncé des cas de corruption impliquant la famille et les associés de Vladimir Poutine, dénonce le rapport.
Quelques progrès démocratiques
Des progrès démocratiques ont renforcé la liberté de la presse en Ukraine cette année, mais certaines restrictions visant les médias russes afin de renforcer une couverture médiatique «patriote» soulèvent des interrogations quant à l’engagement du gouvernement à soutenir une presse indépendante.
Il n’y a cependant pas eu que des mauvaises nouvelles cette année. Les gouvernements en Afghanistan (60 points), en Argentine (46), au Panama (41) et au Sri Lanka (61) ont en effet déployé des moyens considérables pour améliorer les conditions de travail des médias, qui avaient souffert des actions de leurs prédécesseurs. Reste à constater les effets réels des mesures prises dans ces pays.
Par: Janie Matthews translated by Emilie Buffet
Source: EURACTIV.com