En réalité: la Russie prépare depuis l’année dernière une campagne de désinformation sur une « attaque ukrainienne » contre la république non reconnue.
Après la série d’explosions du 25 avril en Transnistrie, la propagande russe et ses marionnettes à Tiraspol se sont empressées de désigner l’Ukraine et des « manipulateurs secrets » des États-Unis comme leurs auteurs. Ces accusations sont réfutées par les autorités de Chisinau et de Kiev. De plus, les rapports propagandistes indiquent que la préparation des supports de communication pour les provocations auraient commencé dès l’année dernière.
Le 25 avril, des personnes non identifiées ont frappé le bâtiment du « ministère de la sécurité de l’État » à Tiraspol avec un lance-grenade. Des explosions ont ensuite eu lieu dans le village de Mayak, au « Transnistrian TV and Radio Center » et dans la localité de Zabori, où se trouve une « unité militaire » de Transnistrie.
Des dizaines de sources de propagande ont déclaré que l’Ukraine semblait avoir attaqué la Transnistrie, en particulier Semen Pegov, Tsargrad, Vesti.ru, Zvezda, etc.
«Comme le montrent les premiers résultats de l’enquête opérationnelle, les traces de ces attaques mènent en Ukraine. Je suppose que ceux qui ont organisé cette attaque ont pour objectif d’attirer la Transnistrie dans le conflit», a déclaré le dirigeant transnistrien Vadim Krasnoselsky dans un communiqué.
Il convient de noter qu’après le premier incident, les médias locaux ont publié le lieu et les photos des lance-grenades qui ont probablement été utilisés lors de l’attaque. Les photos publiées montrent des RPG 27 et 22.
Immédiatement, des canaux anonymes sur Telegram ont lancé toute une campagne de désinformation indiquant qu’il s’agissait de lance-grenades de type soviétique, et que donc, automatiquement, ils étaient en provenance d’Ukraine.
Dans un commentaire à StopFake, le président de l’administration militaire régionale d’Odessa, Oleg Bratchuk, a expliqué qu’au contraire, l’Ukraine ne dispose pas de tels lance-grenades en service. En particulier, selon lui, le « RPG – 27 Tavolga » est utilisé en Russie, en Transnistrie, en Jordanie et au Gabon ».
Dans sa déclaration sur la déstabilisation de la situation sur le territoire non contrôlé, la présidente moldave Maya Sandu a indiqué que, selon ses informations, derrière ces événements il faut chercher des forces antagonistes enTransnistrie même.
La vague de propagande accompagnant le conflit en Transnistrie est née il y a longtemps. Les récentes accusations de l’Ukraine ou des États-Unis ne sont que la suite logique de cette campagne, qui date de l’année dernière.
« L’Ukraine a commencé une guerre de sabotage. Kiev, et avant tout ceux qui la manipulent, ne cachent plus leurs objectifs… Chez nous, en Russie, on attend déjà des propositions visant à faire de la Transnistrie une partie de la Russie », raconte un reportage de la chaîne propagandiste russe Tsargrad en décembre 2021.
En Russie, ce discours est devenu un élément à répétition de la propagande d’Etat. L’affirmation « les États-Unis cherchent la guerre » est utilisé pour faire passer les provocations russes en Transnistrie pour un élément du « grand jeu géopolitique ».
« L’Occident est collectivement responsable de cette situation. Le fait est qu’il n’y a pas si longtemps, il y a quelques semaines, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a défini la Transnistrie comme un territoire prétendument occupé par la Fédération de Russie. Cela constitue une provocation directe et une invitation à une attaque directe ou à un sabotage terroriste. Il n’y a pas d’autre explication à cela », a déclaré le « politologue » transnistrien Andrei Safonov sur l’antenne d’une chaîne de télévision de propagande.
Des chercheurs de la Direction générale du renseignement de l’Ukraine (HUR) sont également convaincus que les provocations russes en Transnistrie sont de nature planifiée. Leur but est d’entraîner la Transnistrie dans la guerre contre l’Ukraine. Selon le HUR, les explosions ont été planifiées par les dirigeants de Tiraspol, ce qui se confirme par un document publié le 22 avril. Ce texte indiquait la nécessité de préparerun « poste de contrôle de la protection civile dans la ville » et d’en créer un de toute urgence, en cas où il n’y aurait aucune installation similaire.
Pour envenimer davantage la situation en Transnistrie, les propagandistes ont également utilisé le facteur roumain. L’idéologie de la « république moldave du Dniestr » autoproclamée (RMD, plus connue en français sous le nom de Transnistrie) étant construite sur une rhétorique anti-roumaine, la « menace » de Bucarest est également un outil traditionnel d’intimidation de la population. Dans le contexte actuel, des canaux Telegram anonymes ont commencé à publier des un montage vidéo montrant une colonne de chars en provenance de Roumanie se dirigeant vers la Moldavie.
Selon Newsmaker, le ministère roumain de la Défense a immédiatement réfuté ces affirmations.
Le facteur roumain a également été mentionné dès le début de la déstabilisation. Par exemple, l’information sur la « présence importante de soldats roumains » en Moldavie a été publiée pour la première fois par Igor Strelkov (Girkin), un combattant russe et officier du FSB, le service de renseignement russe, qui a participé aux actions militaires non seulement dans le Donbass, mais aussi en Transnistrie.
Cela s’accompagne également de dizaines d’articles indiquant que Kiev envisage de prendre Tiraspol et que Bucarest prévoit de prendre Chisinau. « La détérioration de la situation en Transnistrie n’est pas accidentelle, alors que l’opération militaire spéciale russe en Ukraine se prolonge. Il est clair pour certains acteurs géopolitiques régionaux que l’on perd du temps. C’est le cas de la Roumanie, qui rêve d’annexer la Moldavie. L’actuelle direction pro-occidentale de la Moldavie joue également en faveur de Bucarest », dixit la propagande russe.
Pendant ce temps, sur le fond de ce rideau médiatique, un rassemblement militaire bien réel a commencé en Transnistrie.
Rappelons que StopFake a déjà réfuté un fake largement répandu selon lequel l’Ukraine tenterait de saisir des entrepôts militaires à Kolbasna en raison d’un manque de munitions pour les opérations militaires contre la Russie.